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Discours de l’Ambassadeur LU Shaye Au Forum Chine-France de Paris 2023
2023-11-16 01:22

Le 14 novembre 2023, le deuxième Forum Chine-France de Paris organisé par l’Ambassade de Chine en France s’est tenu au Musée Guimet. Voici l’allocution d’ouverture de L’Ambassadeur Lu Shaye :

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

Bonjour ! Bienvenue à la deuxième édition du Forum Chine-France de Paris. Le 27 janvier 2024 marquera le 60e anniversaire des relations diplomatiques entre la Chine et la France. Dans cette perspective, le forum d’aujourd’hui est un « événement d’échauffement » pour mieux préparer cette échéance majeure, mais aussi l’Année sino-française du tourisme culturel en 2024. 

Dans le calendrier traditionnel chinois, les cycles du monde se renouvellent tous les 60 ans. Ainsi, placé sous le thème « 60 ans de relations Chine–France, un nouveau départ vers de plus grands horizons », ce forum a pour objectif de passer en revue le chemin parcouru, d’en tirer les enseignements et de bien positionner les relations sino-françaises dans un monde en pleine mutation et turbulence. Au nom de l’Ambassade de Chine, je tiens à exprimer mes sincères remerciements et respects à tous les invités ici présents, et à travers vous, aux Chinois et aux Français de tous horizons qui, depuis longtemps, témoignent intérêt et soutien aux relations sino-françaises !

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

Nous entrons dans une époque mouvementée et d’incertitudes. Des changements jamais vus depuis un siècle s’opèrent à un rythme accéléré, les relations internationales se restructurent en profondeur, et une multitude d’antagonismes font surface. Alors que l’ombre de la pandémie du siècle plane encore et que la reprise économique mondiale reste morose, la crise en Ukraine perdure et un nouveau conflit israélo-palestinien vient d’éclater brutalement. La crise, hélas, semble être devenue le leitmotiv de cette époque, où des crises liées au climat, à l’énergie, à l’alimentation, à la mondialisation économique et à la gouvernance mondiale se succèdent et s’imbriquent. Plus inquiétant encore : faisant fi des leçons des deux guerres mondiales et de la guerre froide, l’hégémonisme et la mentalité de la guerre froide continuent de régner, la géopolitique et la confrontation des grandes puissances sont en train d’entraîner le monde dans l’abîme du conflit, voire de la guerre.

Au milieu de ces mutations et bouleversements, et dans le tableau gris de la scène internationale, toutefois, les relations sino-françaises brillent par leur stabilité. Cette année, le président Emmanuel Macron a effectué une nouvelle visite en Chine après trois ans d’intervalle, et le premier ministre chinois Li Qiang a choisi la France pour effectuer son premier déplacement à l’étranger après son entrée en fonction ; la Chine et la France ont tenu ou tiendront bientôt une nouvelle session du dialogue stratégique, du dialogue économique et financier de haut niveau et du dialogue de haut niveau sur les échanges culturels et humains, et les deux pays ont signé des dizaines d’accords et de contrats dans l’aéronautique, l’agroalimentaire, la recherche scientifique, la culture, etc. Même en prenant du recul historique, nous pouvons constater que la stabilité a toujours été le fil conducteur des relations sino-françaises, qui ont su résister aux épreuves des aléas internationaux des 60 dernières années. Tout comme un grand navire naviguant sagement dans un océan agité, malgré des hauts et des bas, les relations Chine–France n’ont jamais dévié de la route principale de l’amitié et de la coopération.

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

Nous avons constaté donc, d’un côté, un monde de plus en plus turbulent, et de l’autre, des relations sino-françaises qui avancent solidement. Face à ce contraste saisissant, trois questions s’imposent.

Première question : quels enseignements peut-on tirer de la stabilité durable des relations sino-françaises, pour traiter les relations actuelles entre les grandes puissances ? Pour y répondre, nous devons d’abord comprendre pourquoi les relations Chine–France ont su rester stables au fil des ans. En fait, il y a dix ans déjà, lors de la célébration du cinquantenaire des relations diplomatiques sino-françaises, le président Xi Jinping avait déjà donné la réponse, en faisant preuve d’une vision historique profonde : il s’agit de l’engagement initial pris lors de l’établissement de nos relations diplomatiques, à savoir « indépendance, compréhension mutuelle, clairvoyance, bénéfice mutuel et gagnant-gagnant ». Ce principe a illuminé les 60 années glorieuses des relations sino-françaises, et demeure d’une pertinence cruciale pour la gestion des relations internationales d’aujourd’hui, en particulier pour la réflexion sur la manière de s’entendre entre grandes puissances.

— L’indépendance, c’est ce qui a façonné le caractère pionnier des relations sino-françaises.

Lorsque la Chine et la France ont annoncé l’établissement de leurs relations diplomatiques en janvier 1964, le journal Le Monde titrait son éditorial « Rencontre de deux indépendances ». En effet, les relations sino-françaises ont commencé grâce à l’indépendance. Lors d’un conseil des ministres sur l’établissement de relations diplomatiques avec la Chine, le général de Gaulle affirmait ceci : « un jour ou l’autre, […], la Chine sera une grande réalité politique, économique et même militaire », soulignant les bénéfices que les relations avec la Chine pourraient apporter à la France et même à ses alliés. C’est sur la base d’un tel jugement perspicace, nourri par l’esprit d’indépendance et pionnier, que le général de Gaulle a pris l’initiative de tendre le rameau d’olivier à la Chine, faisant ainsi de la France le premier grand pays occidental à établir des relations diplomatiques au niveau d’ambassadeurs avec la Chine nouvelle. Au cours des 60 dernières années, de l’établissement du premier partenariat global entre la Chine et un grand pays occidental, au lancement du dialogue stratégique ; de la création des premiers centres culturels entre la Chine et un pays occidental, à l’organisation des Années croisées ; de l’ouverture de la première ligne d’aviation civile entre la Chine et l’Occident, au premier projet de coopération dans le nucléaire civil, en passant par l’exploration conjointe de marchés tiers, la Chine et la France ont toujours avancé à l’avant-garde des relations entre la Chine et l’Occident.

— La compréhension mutuelle, c’est l’atout permettant à la Chine et à la France de transcender les divergences pour rechercher un terrain d’entente.

En février 1961, le président Mao Zedong a rencontré le sénateur François Mitterrand, qui deviendrait 20 ans plus tard président français. Évoquant l’établissement de relations diplomatiques, Mitterrand faisait remarquer ceci : la France se trouve loin de la Chine, cela est certes peu important, mais il y a un mur qui sépare les deux pays. À ce constat, le président Mao répondit fermement : « le mur n’est pas très haut, il est franchissable. Il existe différentes sortes de murs, mais ils sont temporaires, car le peuple finira par les abattre. Les murs d’idéologies et les murs de systèmes sociaux peuvent être démantelés tant que le principe de non-ingérence mutuelle dans les affaires intérieures est respecté ». Fin de citation. En effet, la Chine et la France sont situées aux extrémités opposées du continent eurasiatique, et elles ont de grandes différences en termes de systèmes sociaux, d’histoire, de culture et de niveaux de développement. Cependant, il y a 60 ans déjà, les dirigeants des deux pays nous ont clairement indiqué qu’il faudrait toujours faire preuve de compréhension mutuelle et rechercher un terrain d’entente par-delà les différences, de façon à « démolir les murs » plutôt que d’en « construire ». La Chine et la France partagent la conviction que le monde est beau grâce à sa diversité. Prenons l’exemple de la cuisine chinoise et de la cuisine française : malgré les différences d’ingrédients et de méthodes de cuisson, elles sont toutes deux capables de produire des plats délicieux reconnus dans le monde entier, et peuvent s’apprécier et s’inspirer mutuellement. Les 60 ans des relations Chine–France prouvent que le partenariat est possible non seulement entre deux pays aux mêmes idéaux, mais aussi entre ceux qui veulent le faire malgré leur différence.

— La clairvoyance, c’est ce qui a doté les relations sino-françaises de leurs caractères stratégique et exemplaire.

La Chine et la France sont des bâtisseurs importants de l’architecture mondiale. Il y a 60 ans, alors que la guerre froide battait son plein, la poignée de main entre la Chine et la France, transcendant la division des deux blocs, a déclenché une « explosion nucléaire diplomatique » et accéléré la démocratisation des relations internationales. Depuis, les générations successives de dirigeants chinois et français, forts de leur clairvoyance stratégique, ont assidûment exploré et pratiqué le dépassement de la confrontation des blocs, la recherche des terrains d’entente, la coexistence pacifique, le bénéfice mutuel et le gagnant-gagnant. De nombreux projets de coopération stratégique pionniers ont ainsi vu le jour. En tant que membres fondateurs des Nations unies et membres permanents du Conseil de sécurité, nos deux pays défendent le système international centré sur les Nations unies et l’ordre international fondé sur le droit international, soutiennent un rôle plus important de l’ONU, et pratiquent le véritable multilatéralisme. En tant que grands pays responsables, nos deux pays maintiennent un dialogue étroit sur presque tous les points chauds régionaux, jouant un rôle constructif dans la promotion des pourparlers de paix et le règlement des différends par le dialogue. La Chine et la France attachent un grand prix au rôle de l’autre en tant que grand pays, et ont toujours soutenu les grandes initiatives internationales lancées par l’autre, en particulier sur les dossiers du changement climatique et de la biodiversité, où de nombreuses actions de coopération sino-française d’importance historique ont servi de référence aux autres pays.

— Le bénéfice mutuel et le gagnant-gagnant, c’est une force motrice inépuisable pour faire avancer les relations sino-françaises.

Le bénéfice mutuel et le gagnant-gagnant représentent l’objectif initial de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France, et constituent une force motrice importante pour leur développement au cours des six dernière décennies. En effet, la coopération pratique sino-française a apporté des bénéfices tangibles aux peuples chinois et français. En 60 ans, le commerce bilatéral entre nos deux pays a été multiplié par plus de 800, passant de seulement quelque 100 millions de dollars en 1964, à 81,2 milliards de dollars en 2022. Aujourd’hui, la France est le troisième partenaire commercial et la troisième source d’investissements réels de la Chine dans l’Union européenne, tandis que la Chine est le premier partenaire commercial de la France en Asie et le septième dans le monde. Les produits français de qualité comme les cosmétiques, le vin et la viande de bœuf ont enrichi les choix des consommateurs chinois, et le marché gigantesque de la Chine a contribué sensiblement au développement de l’économie française. En 60 ans, les investissements croisés entre la Chine et la France se sont développés à partir de zéro et ont donné des fruits abondants. Jusqu’en fin 2021, selon les statistiques chinoises, plus de 6 000 entreprises françaises ont été créées en Chine, avec un stock d’investissement de plus de 18 milliards de dollars, tandis que le stock des investissements directs chinois en France s’élève à près de 4,9 milliards de dollars ; selon les statistiques françaises, la Chine est devenue depuis trois ans consécutifs son premier partenaire asiatique en termes d’investissement et de création d’emplois en France. Par ailleurs, la coopération sino-française sur des projets structurants dans l’énergie nucléaire, l’aéronautique et l’aérospatiale est particulièrement remarquable. À titre d’exemple, dans le domaine aéronautique, la Chine a introduit son premier avion Airbus en 1985 et, à la fin 2022, le nombre total d’avions civils Airbus en service en partie continentale de la Chine était de 2 123, soit 54 % de part de marché en Chine.

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

La deuxième question que nous devons nous poser est de savoir si les relations sino-françaises peuvent rester solides au milieu des tourmentes. La réponse est oui. Notre confiance vient des trois gages de stabilité des relations sino-françaises.

Le premier gage de stabilité, c’est notre sens des responsabilités en tant que grands pays. Les relations entre grands pays sont souvent susceptibles d’influencer, voire de changer le cours de l’Histoire. À l’heure actuelle, la société humaine se trouve de nouveau à la croisée des chemins. Certains grands pays, agissant de manière irresponsable, ont provoqué et alimenté des conflits entre grandes puissances, entraînant une intensification des clivages dans les relations internationales et une augmentation sans précédent des risques de conflits. Dans ce contexte, le maintien de la stabilité des relations entre la Chine et la France, deux pays majeurs représentant les civilisations orientale et occidentale, revêt une portée mondiale significative : car de bonnes relations sino-françaises joueront un rôle clé sur les relations sino-européennes ; et quand la solidité des relations sino-européennes est assurée, la moitié du chemin est faite pour les relations entre la Chine et l’Occident ; et quand les relations Chine-Occident vont bien, le monde peut avancer dans la stabilité. La grandeur d’un grand pays réside non seulement dans sa taille, mais aussi et surtout dans son ouverture d’esprit. La nation chinoise a toujours eu à cœur de contribuer au bien commun du monde. Et le général de Gaulle disait aussi, « la France ne serait pas la France sans la grandeur ». La Chine et la France sont toutes deux de grands pays épris de paix, dotés d’un sens des responsabilités et de mission historiques. Plus la situation internationale est complexe, plus nos deux pays ont le besoin et la volonté de se parler et de se concerter.

Le deuxième gage de stabilité, c’est notre vaste communauté d’intérêts. La Chine et la France ont une forte complémentarité économique et un énorme potentiel de coopération. Depuis de longues années, la contribution de la Chine à la croissance économique mondiale est supérieure à 30 %, et au fur et à mesure que la Chine travaille à promouvoir un développement axé sur la qualité et une ouverture à un niveau élevé, les avantages qu’offrent le méga-marché chinois et le système industriel complet de la Chine ne feront que grandir, ce qui créera constamment de nouvelles opportunités à la France et aux autres pays du monde. La Chine et la France ont un grand potentiel de coopération dans les domaines de l’aérospatiale, de l’aéronautique, du nucléaire civil, de l’agroalimentaire, des biens de consommation haut de gamme et des véhicules à énergie nouvelle, et leurs perspectives de coopération dans les domaines émergents tels que le commerce des services, l’économie verte, la santé, le tourisme, la culture, la lutte contre le changement climatique et la protection de la biodiversité sont très prometteuses. En outre, la Chine et la France n’ont pas de conflits géopolitiques directs et partagent une vaste communauté d’intérêts et des visions similaires sur de nombreux dossiers internationaux. Certes, nous avons inévitablement des divergences sur certaines questions spécifiques, mais ce n’est pas l’aspect principal des relations sino-françaises ; au contraire, la Chine et la France sont tout à fait capables de trouver des terrains d’entente par le dialogue, et d’assurer ainsi un développement sain et régulier de leurs relations sur le long terme.

Le troisième gage de stabilité, c’est notre amitié populaire profondément ancrée. Actuellement, il existe 111 jumelages entre les collectivités locales chinoises et françaises, la Chine est l’une des principales sources d’étudiants étrangers en France, et un grand nombre d’établissements scolaires des deux pays proposent des programmes d’enseignement de la langue de l’autre. Avant la pandémie, Paris figurait parmi les villes européennes accueillant le plus grand nombre de vols directs depuis la Chine, et la Chine était la première source de touristes pour la France en Asie. Depuis le début de cette année, la mobilité humaine entre la Chine et la France, jusque-là touchée par la Covid, a sensiblement repris. Récemment, je me suis rendu dans plusieurs collectivités territoriales françaises. Dans le Val de Loire, les institutions touristiques, culturelles et muséales françaises m’ont fait part de leurs vifs souhaits d’accueillir le retour des touristes chinois en France, et ont déjà mobilisé des dispositifs attentionnés à cet égard. Au ZooParc de Beauval, j’ai vu l’amour sincère du peuple français envers le panda géant Yuan Meng, l’autre « ambassadeur de Chine en France », et ressenti combien les Français étaient tristes de le voir retourner en Chine. À Cognac et à Saint-Emilion, j’ai appris l’excellente performance des produits spiritueux français de haute qualité sur le marché chinois et les vastes perspectives de coopération future. À Biarritz et à Carcassonne, j’ai découvert le grand potentiel de la coopération décentralisée sino-française et l’enthousiasme des collectivités locales françaises pour l’approfondissement de notre coopération sur le commerce, la culture, le tourisme et les festivals. Ces déplacements m’ont permis de ressentir véritablement l’importance de l’amitié entre les peuples pour les relations entre les pays. Ce n’est qu’en multipliant les contacts que nous pouvons lever les barrières et les malentendus ; ce n’est qu’en approfondissant la connaissance mutuelle que nous pouvons chasser les craintes et les peurs ; et ce n’est qu’en renforçant la coopération que nous pouvons accroître l’amitié et le consensus.

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

La troisième question à laquelle nous devons réfléchir est la suivante : dans le nouveau contexte, quelle direction les relations Chine–France doivent-elles prendre et quelle contribution peuvent-elles apporter à la paix et au développement du monde ? Sur ce nouveau point de départ historique, l’engagement initial de la Chine de renforcer la coopération avec la France reste inchangé, tout comme sa confiance dans la capacité de nos deux pays à travailler ensemble pour changer le monde. Lors de sa visite en Chine en avril dernier, le président Emmanuel Macron a également exprimé son espoir d’approfondir le partenariat global stratégique avec la Chine et de partager avec nous les responsabilités de préserver la paix et la stabilité dans le monde. Dans le même temps, nous devons également être conscients que, face à un environnement international de plus en plus volatile, en particulier devant le contre-courant de la démondialisation et le spectre de la mentalité de la guerre froide, les relations sino-françaises risqueraient de reculer si elles ne progressaient pas. La Chine et la France devraient faire des efforts conjoints pour éliminer les perturbations, bien planifier et concrétiser la feuille de route pour le développement de leurs relations dans la prochaine étape. À cet égard, j’aimerais partager avec vous quatre suggestions :

Premièrement, nous devons continuer à défendre l’égalité, le respect et la confiance mutuelle.

L’égalité est une condition préalable à la coexistence harmonieuse entre les nations. Comme l’a dit le président Emmanuel Macron lors de sa visite en Chine : « Nous savons la différence de nos modèles […]. Mais ce n’est pas parce que nous avons des différences qu’on ne peut pas les évoquer, les partager de manière très franche, […] en ne considérant pas que l’un aurait des leçons à donner à l’autre. Et généralement on arrive à obtenir des résultats, lorsqu’on est respectueux, mieux que quand on donne des leçons. » Fin de citation. En effet, les cultures et les systèmes différents de l’Orient et de l’Occident sont comme deux lampes qui peuvent s’éclairer mutuellement. Nous sommes prêts à travailler avec la France à nous mettre à la place de l’autre, à engager un dialogue sur un pied d’égalité face à nos différences, et à nous opposer ensemble à la création de clivages selon les différences d’idéologies et de systèmes politiques, de sorte à briser le piège du « choc des civilisations ».

Le respect mutuel est une garantie pour le bon développement des relations entre les États. Ce respect comprend non seulement le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de chaque pays, mais aussi celui des systèmes sociaux, des voies de développement, des traditions culturelles et des modes de vie de chacun. Si les relations sino-européennes se sont bien développées dans le passé, c’est notamment grâce au respect mutuel. Cependant, ces dernières années, des changements notables sont intervenus, certains pays s’étant mis à franchir de manière répétée les « lignes rouges » sur des questions touchant aux intérêts fondamentaux de la Chine, telles que Taiwan, le Xinjiang, le Xizang et Hong Kong, ce qui revient à s’ingérer dans les affaires intérieures de la Chine. Nous espérons que la France jouera un rôle positif exemplaire dans le traitement des questions concernées, et qu’elle travaillera auprès de l’Europe pour exclure les interférences extérieures et rétablir la compréhension et le respect mutuels entre la Chine et l’Europe.

La confiance est le meilleur ciment des relations internationales. L’absence de confiance stratégique entre les grands pays peut, dans le moins grave des cas, compromettre leur coopération, et au pire, provoquer des erreurs de jugement stratégiques susceptibles de conduire au conflit et à la guerre. Nous sommes prêts à travailler avec la France pour donner l’exemple de la confiance mutuelle entre grands pays, être les premiers à promouvoir la concertation et l’interaction positive entre grandes puissances, accroître la confiance mutuelle, dissiper les doutes et gérer les divergences par des dialogues sincères dans divers domaines et à divers niveaux, et focaliser nos moyens et nos ressources sur le développement et la prospérité communs, plutôt que sur la méfiance et la confrontation.

Deuxièmement, nous devons travailler à forger une perception réciproque objective et positive.

Ces dernières années, sous l’influence des changements dans la situation internationale et notamment ceux des relations sino-américaines, une partie de l’opinion publique française tend à porter un regard négatif à l’égard de la Chine. Certains regardent la Chine à travers un filtre d’« opposition systématique » et se joignent à toutes les vagues de tapage autour des récits des soi-disant « menace chinoise », « effondrement chinois » ou « responsabilité chinoise ». Certes, aucun pays n’est parfait et il n’y a rien de mal à rapporter et à commenter les problèmes et les défauts des autres tant qu’on le fait de manière objective et honnête. Mais inventer des choses au mépris de la réalité et exagérer délibérément les aspects négatifs de second plan tout en ignorant les aspects positifs de premier plan, cela ne contribuera nullement à améliorer la compréhension mutuelle et ne fera que nuire à la confiance mutuelle entre deux pays et à l’amitié entre deux peuples. Entre la Chine et la France, deux civilisations majeures de l’Orient et de l’Occident, l’établissement d’une perception réciproque positive permettra de montrer au monde toute la possibilité de coexistence harmonieuse qu’il y a pour des civilisations et des systèmes différents. J’espère que la presse française saura préserver sa traditionnelle indépendance d’esprit, voir les relations sino-françaises avec une plus grande largeur de vues, couvrir la Chine avec plus d’objectivité et de bonne volonté et moins de connotation idéologique, et émettre plus de critiques constructives et moins d’attaques malveillantes.

Bien sûr, il faut admettre que les trois ans de pandémie ont aussi joué sur l’accroissement des barrières entre nos deux pays. Nous entendons profiter du 60e anniversaire des relations diplomatiques sino-françaises, de l’Année sino-française du tourisme culturel et des Jeux olympiques de Paris en 2024 pour approfondir les échanges en face-à-face avec la France dans des domaines aussi variés que la culture, l’éducation, la langue, le cinéma, la télévision, le tourisme, les collectivités locales, la jeunesse et les sports, afin que nos deux peuples puissent se forger une perception réciproque plus objective et plus positive.

Troisièmement, nous devons nous ériger en piliers de la coopération ouverte.

La stabilité des relations sino-françaises n’a jamais été un château en l’air, mais s’est construite sur la base de résultats de coopération concrets et de liens d’intérêts étroits. L’interdépendance actuelle entre nos deux pays dans les chaînes industrielles et d’approvisionnement est le résultat naturel de la mondialisation économique et le choix optimal des règles du marché. Ces derniers temps, certains pays parlent à profusion de « réduction de la dépendance » et de « dérisquage ». Ce sont en fait des manœuvres politiques contre les lois économiques, un « découplage » qui ne dit pas son nom, et une coupure forcée des liens économiques entre les pays. Aux temps de la guerre froide, il n’y avait pratiquement aucun lien économique entre les blocs américain et soviétique et, par conséquent, les deux camps avaient les coudées franches de s’engager dans une confrontation militaire, laissant planer constamment l’ombre de la guerre sur le monde. Est-ce cela que certains veulent aujourd’hui ? Ou supposent-ils illusoirement que, tout comme les États-Unis ont fait chuter l’ancienne Union soviétique, en coupant les liens économiques avec la Chine, ils bloqueraient le développement de la Chine et ruineraient les efforts du grand renouveau de la nation chinoise ? Cependant, la Chine n’est pas l’ancienne Union soviétique, et les États-Unis d’aujourd’hui ne sont pas les États-Unis d’hier. Nous devons, aujourd’hui plus que jamais, éviter de retomber dans les vieilles ornières de la guerre froide. 

Qu’une entreprise doive se prémunir contre les risques, cela fait partie du bon sens économique, mais si on en fait une politique à dimension nationale, voire une politique « taillée sur mesure » vis-à-vis d’un pays spécifique, alors cela ne relève plus d’une question économique, mais d’un problème politique. Nous devrons redonner aux entreprises le droit de décision sur le dérisquage, nous abstenir d’outrepasser notre rôle, et plus important encore, éviter de généraliser, politiser ou idéologiser le dérisquage. La Chine et la France sont toutes deux défenseurs de la mondialisation économique et s’opposent explicitement au « découplage ». J’espère qu’elles continueront d’être des pays d’action en faveur d’une coopération ouverte, concrète et gagnant-gagnant, de manière à préserver ensemble la stabilité et la résilience des chaînes industrielles et d’approvisionnement entre la Chine et la France, et entre la Chine et l’Europe.

Quatrièmement, nous devons construire ensemble une communauté d’avenir partagé pour l’humanité.

Face à l’évolution accélérée des grands changements sans précédent depuis un siècle, les doctrines traditionnelles des relations internationales sont de moins en moins capables d’expliquer le monde d’aujourd’hui et peinent à trouver des solutions aux difficultés de l’humanité. Dans ce contexte, de nombreux grands pays, dont la France, animés de l’idéal de chercher le bien commun, œuvrent à trouver des réponses aux questions de l’époque, « Qu’est-ce qui est arrivé à ce monde et que pouvons-nous faire ? » Ces dernières années, le président Emmanuel Macron a activement agi pour harmoniser les relations entre grands pays, offrir ses bons offices aux conflits régionaux et améliorer la gouvernance mondiale, ce qui reflète l’ambition et l’engagement de la France en tant que grande puissance.

La Chine a également cherché sans relâche des pistes pour sortir le monde du bourbier actuel et proposé ses solutions. Il y a dix ans, le président Xi Jinping a avancé pour la première fois la vision d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité. Depuis lors, le cadre théorique de cette vision a été sans cesse optimisé ; les cinq idées essentielles de cette vision, à savoir l’ouverture et l’inclusion, l’équité et la justice, la coexistence harmonieuse, l’enrichissement mutuel dans la diversité, ainsi que la solidarité et la coopération, se sont enracinées dans les esprits ; les cinq axes de cette vision, à savoir partenariats, sécurité, développement, dialogue inter-civilisationnel et écologie, se sont progressivement matérialisés ; l’aspiration à un monde meilleur de paix durable, de sécurité universelle, de prospérité commune, d’ouverture et d’inclusion, et qui soit propre et beau gagnent de plus en plus d’adhésion ; et la promotion d’un nouveau type de mondialisation économique, la poursuite d’une voie de développement pacifique, la construction d’un nouveau type de relations internationales, la mise en pratique d’un véritable multilatéralisme et la promotion des valeurs communes de toute l’humanité en sont devenues des pistes de mise en œuvre véritablement réalisables. Dans la construction d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité, la Chine est à la fois un pays d’initiative et d’action. Depuis dix ans, elle a favorisé une coopération de qualité dans le cadre de l’Initiative « Ceinture et Route », proposé et concrétisé l’Initiative pour le développement mondial, l’Initiative pour la sécurité mondiale et l’Initiative pour la civilisation mondiale, et entrepris des actions communes avec un nombre croissant de pays et territoires, déployant des efforts inlassables pour transformer en réalité la vision d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité. 

Cette vision d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité est un bien public novateur que la Chine propose au monde. Elle est assise sur le plus grand dénominateur commun, soit la création d’un monde meilleur, et n’implique ni la dispute du droit à la parole, ni la confrontation des systèmes, ni le choc des civilisations, et encore moins le renversement du système international existant. C’est la raison pour laquelle ce concept fait l’objet d’un large consensus au sein de la communauté internationale et a été inclus dans les résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU pendant six ans consécutifs. Cette vision de communauté d’avenir partagé pour l’humanité est par ailleurs en accord avec les principes généraux et les objectifs de la diplomatie française. Nous sommes prêts à travailler avec la France pour continuer à assumer nos responsabilités envers l’avenir de l’humanité en tant que grands pays pionniers, et conduire tous les pays dans la bonne direction, vers la construction d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité, et vers une plus forte synergie pour relever les grands défis communs.

Mesdames et Messieurs, Chers Amis,

Sur un nouveau point de départ, les relations entre la Chine et la France, tout comme les civilisations à la fois anciennes et jeunes de nos deux pays, disposent d’une profonde richesse historique et des possibilités illimitées pour l’avenir. Aujourd’hui, je vous invite à livrer librement vos opinions, à faire part de toutes vos propositions et à faire valoir l’ingéniosité collective, pour contribuer à ce que les relations sino-françaises continuent d’avancer solidement et réalisent d’innombrables possibilités. Je souhaite un plein succès à ce forum.

Je vous remercie de votre attention !


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